L’été a été bercé d’annonces de « méga » opérations de fusions-acquisitions, laissant croire à une reprise très forte de l’activité de rapprochement d’entreprises. C’est à la fois vrai et faux. Les grandes manœuvres sont un peu comme l’arbre qui cache la forêt. Les liquidités disponibles dans les sociétés, notamment les grands groupes cotés, et les fonds d’investissement suscitent des appétits importants pour des cibles attractives. Toutefois, le rythme et le volume global des fusions-acquisitions n’a pas encore retrouvé ses niveaux d’avant crise.

Dans ce contexte, certains chefs d’entreprise que je rencontre se posent la question suivante : est-ce le bon moment de vendre ? Plutôt qu’une réponse sous forme d’affirmation, je propose quatre questions, qui feront l’objet de quatre billets…

La première question à se poser quand on réfléchit à vendre son entreprise est « POURQUOI ? ».

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme »…A l’aune de la finance, nous pourrions dire « techniques et montages financiers sans sens profond font perdre la raison ».

En effet, s’interroger sur le sens profond d’une décision qui engage souvent profondément la vie du dirigeant actionnaire est essentiel. Cette question en apparence simple est pourtant difficile, car l’aveu des raisons profondes d’un tel choix n’est ni aisé, ni toujours confortable. Je pense par exemple à un dirigeant dont nous avions accompagné la cession, et dont le seul mobile de la vente était sa santé fragile et la nécessité pour lui d’engager un traitement lourd ne pouvant lui permettre de poursuivre son activité en l’état…

Parmi les raisons souvent citées : l’âge, la nécessité d’une transmission à la génération future, l’envie de vivre une autre vie, le désir de capitaliser un investissement personnel important dans l’entreprise, l’intérêt à rejoindre un plus grand groupe afin de poursuivre sa croissance, le choix de se concentrer sur un autre business qui vient d’être lancé ou qui nécessite plus de temps et de disponibilité…

Les raisons sont multiples et pourtant propres à chacun. Avant d’engager un processus de cession, il est utile d’y passer un peu de temps, pour bien accompagner le chef d’entreprise dans cette phase de discernement cruciale, et lui permettre d’aborder avec sérénité les étapes le conduisant à finalement vendre. Connaître les raisons qui conduisent à la vente oriente aussi la façon d’aborder la réflexion, et le timing choisi pour l’engager. Un vendeur qui doit vendre pour des raisons de santé n’a pas la même contrainte de temps de réalisation que celui qui décide de cristalliser le fruit de son travail, tout en restant à la fois passionné par son métier et disposé physiquement et mentalement à s’y investir. Un vendeur fatigué voire usé par son rythme et par le stress doit aussi passer du temps à discerner pourquoi il vend, et ce qu’il souhaite faire après la cession, afin de retrouver un enthousiasme (au moins de façade) dans les négociations et être le meilleur ambassadeur de la vente, aux côtés de ses conseils ! Un vendeur pour cause de transmission a tout intérêt à passer du temps pour optimiser celle-ci, notamment humainement, mais aussi juridiquement, voire fiscalement.

Au préalable à tout engagement dans un processus de vente, nous passons toujours du temps avec le dirigeant-actionnaire pour l’accompagner dans cette introspection et valider les motifs de sa décision. De cette étape dépend beaucoup la pertinence de l’approche future, et notamment de la structuration de l’opération visée et du choix des cibles qui pourront acquérir la société.

En résumé, toutes les raisons sont bonnes pourvu qu’elles aient une résonance et un sens réel pour le dirigeant. Les fausses raisons conduisent souvent à être un « faux-vendeur », dont la fragilité des mobiles se révèlera soit au cours du processus de cession, soit au moment de la signature par la fameuse « crampe de stylo » !

Votre point de vue et vos expériences sont précieuses, merci de les partager !